Avant de parler des personnalités de pervers, j'aimerai mentionner les comportements employés lors du harcèlement selon le sexe du harceleur. Ces statistiques proviennent du travail de Heinz Leymann (consulter The Mobbing Encyclopaedia, son livre Mobbing Ed Seuil) et sont relatées dans le travail du Dr Manuelle von Strachwitz .

Hommes harceleurs:

  1. Modifier incessamment les tâches professionnelles attribués à la victime
  2. Le menacer verbalement
  3. Ne plus lui adresser la parole
  4. Agresser ses convictions politiques et religieuses
  5. Isoler son poste de travail
  6. L'interrompre de façon incessante
  7. Le contraindre à des tâches humiliantes

Femmes harceleuses:

  1. Tenir des propos désobligeants concernant la victime à l'insu de celle-ci
  2. La ridiculiser en public
  3. Propager des rumeurs non fondées
  4. La priver de toute possibilité de s'exprimer
  5. Se gausser publiquement d'une éventuelles infirmité, d'un travers
  6. Procéder par allusions, sans jamais parler ouvertement
  7. Faire pression en critiquant sans arrêt son travail

Personnellement, je n'ai pas trouvé de différences "sexistes" significatives dans les procédés utilisés. Dans "J'ai un patron psychopathe", Isabelle Mercier et Monique Osman décrivent quelques "tactiques" de pervers (la description ci-dessous respectera bien sûr la règle du simple extrait à titre d'exemple). Vous trouverez l'intégralité du texte dans leur livre (voir biblio). Il faut savoir aussi que, malgré que leur livre soit plus axé sur le patronat, les descriptions données correspondent à tous les types de harceleurs (collègues, parents, etc...). Lilian Glass (voir biblio) recense 30 types de toxiques, dont la plupart ne sont que de simples casse-pieds (et on est tous le casse-pieds de quelqu'un d'autre), mais dont certains types pourraient facilement glisser vers le harcèlement. Une autre caractéristique qui revient souvent est la séduction. Le pervers sait généralement se faire bien voir de la majorité ambiante par une politique de petits cadeaux qui, parfois, ne lui reviennent pas chers. Il connaît les besoins de chacun et ce qu'il est capable d'offrir et sait tirer profit de la table de correspondance en se contentant d'être un intermédiaire.

Certains sites parlent de personnalité floue des pervers, d'autres d'une personnalité-type. Floue n'est pas le terme adéquat. Les pervers, comme indiqué plus bas, ont chacun leur motivation et leur propre manière d'agir, mais ils ont quelques caractéristiques communes comme de ne pas éprouver de remords du mal qu'ils peuvent faire. Cela peut être par égoïsme, mais cela peut être par désir de vouloir rendre la justice eux-mêmes, avec toutes les dérives que peuvent entraîner les notions de bien et de mal basées sur des concepts totalement personnels ou sur des données fausses comme les commérages.   

Vous trouverez ci-dessous quelques technique utilisées avec des exemples réels. Bien sûr, les lettres des prénoms ont été modifiées et toute ressemblance avec une personne connue ne serait que coïncidence fortuite. Les techniques décrites ne sont ni exhaustives, ni utilisées seules. Un pervers pourra en utiliser plusieurs pour déstabiliser sa victime.

technique de l'indifférence:

Cette technique consiste à offrir un mur d'indifférence à victime, pour déclencher une réaction violente de celle-ci, ce qui lui permettra d'inverser les rôles, de passer pour la victime et ainsi de se faire aider par les témoins n'ayant pu constater que l'agressivité de la vraie victime.

technique du mensonge:

Cette technique consiste à déformer ce que dit la victime et à lui prêter des pensées qui ne sont en fait que celles que le pervers veut faire attribuer à la victime. Il s'agit là d'un pervers intelligent car son argumentation doit apparaître à l'auditoire comme logique et convaincante. Cette technique s'allie souvent à celle de la récupération de ragots et consiste cette fois-ci à déformer  les paroles et actes de la victime dans le sens d'un ragot circulant sur la victime, que l'auteur en soit le pervers ou non. 

technique de la plaisanterie:

Un exemple de dénigreur-plaisantin: J.M. J.M racontait qu'un jour qu'il faisait les courses, il avait remarqué qu'une voiture, garée non loin de la sienne, équipée d'une boule pour remorque, avait accrochée celle-ci dans la clôture basse, sans doute là pour empêcher que l'on piétine la pelouse. Constatant que la dite voiture était encore présente une fois ses courses terminées, il attendit que le propriétaire termine les siennes pour observer à distance ce qui allait se passer. Il espérait beaucoup que la boule entraînerait le fil de fer et que la clôture serait arrachée. Il en fût pour ses frais car le fil de fer repassa par dessus la boule sans que rien ne soit abîmé.

Ce qu'il faut retenir de cette histoire, c'est que la volonté de rire du malheur des autres est ici supérieure à la notion d'entraide et aux ennuis que n'aurait pas manqué de s'attirer le propriétaire de la voiture. J.M a exactement le même comportement quand il détecte un conflit entre deux de ses collègues. Il s'arrange pour jeter habilement de l'huile sur le feu des deux côtés et n'a plus qu'à se délecter des résultats. C'est ce genre d'individus que l'on appelle les "trolls" dans les forums (newsgroups). Ils postent des messages (généralement hors sujet) et cherchent à générer une polémique entre les intervenants habituels.

technique du commérage:

La commère adore répandre des rumeurs, voire déformer celles qu'elle récolte et éventuellement en inventer. Sa motivation profonde est de se faire accepter et de paraître importante. Ne pouvant l'être de par sa propre nature, elle se sert des rumeurs pour le devenir. Bien sûr, elle en dit peu sur elle-même et ne supporte pas quand elle devient elle-même l'objet d'une rumeur. Les ragots les plus couramment utilisés sont à caractère sexuel (la victime est nymphomane, a réussi en couchant, est homosexuel(le),etc.) et/ou atteinte psychiquement (est dépressif(ve)). Personne n'en vérifiera jamais le bien-fondé, mais tout le monde le répètera.

Bien que le texte soit mis au féminin, et que Heinz Leymann définit la rumeur comme un comportement employé essentiellement par des femmes, j'ai retrouvé ce comportement chez beaucoup d'hommes. Leur phrase préférée pour se justifier de propager des commérages est "il n'y a pas de fumée sans feu". Sauf qu'en étant un relais ou le départ, il deviennent en même temps  fumée et  feu (récepteur et émetteur du même commérage). Il suffit donc effectivement d'une personne mal-intentionnée au départ ou d'une personne qui a mal interprété une parole ou une action pour qu'une fausse réputation se propage d'un individu à un autre.

Les rumeurs ont ceci de particulier qu'elles ont la vie plus dure que les vérités et qu'elles se diffusent plus facilement. Ainsi, la rumeur d'Orléans prétendait que les cabines d'essayage des marchands de vêtements étaient équipées de trappes, que les jeunes femmes étaient ensuite conduites dans un sous-marin naviguant dans la Loire qui les emmenaient pour la traite des blanches. Un sous-marin dans la Loire, cela devrait faire sourire tout le monde. Et bien pourtant, la rumeur a duré tellement longtemps que nombre de commerçants ont fait faillite et que d'autres ont eu du mal à s'en relever.

Une autre rumeur, qui relève du cas de harcèlement moral, concerne la chanteuse Sheila. Accusé d'être un homme, la rumeur continuera malgré son mariage et malgré qu'elle ait été enceinte (les mauvaises langues prétendront qu'il s'agissait d'une poche d'eau et que l'enfant qu'elle aura a été adopté. Résultat, éprouvée et écœurée, elle quittera le monde du spectacle pour s'isoler. Elle n'est pas la seule à avoir eu à subir ce genre de calomnies puisqu'une certaine presse vit uniquement d'articles de cette catégorie. Bernard Giraudeau traîne derrière lui une réputation d'homosexuel pas plus méritée. Quant à Isabelle Adjani, elle viendra s'expliquer sur un plateau de télé sur une rumeur circulant sur elle comme quoi elle serait atteinte du SIDA. Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose. Je pense que le film "Le placard" est conforme à la réalité. Il suffit qu'une personne soit soupçonnée d'une chose ou d'une autre pour que le regard des autres change à son sujet, sans que la personne ait changée d'un poil. Je pense que je rajouterai un jour quelques liens sur des sites consacrés aux légendes urbaines.

Un autre manière de harceler pourra donc être de faire courir un bruit sur la victime. A un certain stade, plus personne ne connaît l'émetteur du bruit, donc si un individu a le transmet ne serait-ce qu'à deux autres  individus b et c, celui-ci va être transmis à de nouveau à d'autres personnes et reviendra aux oreilles de b et c qui en déduiront que ce bruit était vrai puisqu'ils en entendent parler de nouveau par quelqu'un d'autre que b et c y trouveront une sorte de justification de leur acte sans se rendre compte qu'ils servent les intérêts de a. La personne qui en est victime ne pourra pas se justifier car il faudrait démontrer à chaque personne individuellement qu'elle se trompe. La réputation perdurera donc même avec le départ du ou des pervers car il n'existe pas de moyens de lutter contre les rumeurs. 

La psychologie sociale théorique et expérimentale (voir biblio) enseigne que moins on a de possibilités de mettre à l'épreuve ses opinions par observation des conséquences physiques, plus on tend à faire confiance à la confirmation sociale pour décider de ce qui est juste et valide. Et même dans le cas où on peut faire l'épreuve physique de la réalité (exemple un enfant peut constater qu'un poêle dont on  lui a dit qu'il brûlait brûle effectivement), on accepte souvent la réalité sociale parce qu'elle est plus rapide. Transposé à l'échelle du commérage, cela explique que les commérages non vérifiables sont ceux qui sont exposés à être diffusés à la plus grande échelle sans que personne ne les vérifie jamais et pourquoi au bout d'un certain temps tout le monde répètera les mêmes âneries. 

technique de l'hypocrisie:

Avec un(e) ami(e) comme lui (elle), qui a besoin d'un(e) ennemi(e)?
Considéré(e) comme la plus toxique dans la galerie de portraits de Lilian Glass. Rien ne peut plus blesser que d'avoir été trahi par quelqu'un en qui on avait confiance. Ces personnes se prétendent vos amies et vous poignardent dans le dos à la première occasion. Elles utiliseront les confidences que vous leur aurez fait au moment où vous vous y attendrez le moins.

Méfiez-vous du téléphone! Soit ce genre de personne vous parlera fort en vous nommant. Ne vous en étonnez pas, quelqu'un est probablement à côté d'elle et elle souhaite lui faire parvenir le message. Soit elle mettra l'amplificateur en route et prétendra qu'il y a de l'écho sur la ligne. En fait, votre conversation sera diffusée par ce biais à d'autres. Il lui suffira, si vous êtes en confiance, d'aiguiller habilement la conversation sur des sujets compromettants pour vous faire mettre à dos non seulement ceux qui ont bénéficié de la conversation, mais leurs amis. Un autre moyen peut être de venir vous voir et de jouer celui qui est navré du conflit que vous avez avec x, de vous pousser à faire des confidences, voire d'en rajouter dans le même sens que vous, et ensuite d'aller tout répéter à l'intéressé en le présentant comme entièrement de votre cru, ce qui ne manquera pas d'envenimer vos rapports avec x. 

Technique d'attaques indirectes

Ainsi, D fût embauché par A pour un CDD, malgré un âge dépassant la cinquantaine. La qualité du travail réalisé, mais aussi le fait qu'A ait accepté de prendre le risque de l'embaucher, permettront à D d'obtenir plusieurs contrats dans la même entreprise (sous forme de CDD et d'intérim). On pourrait croire que D a été reconnaissant à A. Eh bien, pas du tout. Une fausse réputation d'homosexuel circulant sur le compte de A, et D étant particulièrement homophobe, D fera son pot de départ à la fin de la première mission pendant qu'A est en vacances et ne manquera jamais une occasion d'ouvrir le frigo devant A en disant "Tiens, il reste encore des bouteilles de mon pot". Il ne manquera jamais non plus d'utiliser des mots comme "pédé", "pédale", "homo" au détour de chaque conversation.

Là, on touche le harcèlement moral contagieux comme celui que l'on peut rencontrer dans les cas de racisme, sexisme ou à l'encontre des  minorités sexuelles. Les individus ne sont plus jugés par rapport à ce qu'ils sont, mais réduits à leur appartenance à une minorité raciale ou sexuelle (dans l'exemple, il s'agit en plus d'une supposition fausse, A étant hétérosexuel). Le terrain est donc beaucoup plus favorable à un pervers si la victime possède une caractéristique  inverse de celle du milieu ambiant. Il pourra donc faire ressortir des critères comme la couleur de la peau, l'homosexualité (réelle ou inventée), le sexe (femme dans un milieu macho, par exemple) pour avoir immédiatement derrière lui un certain nombre de personnes intolérantes. On retrouve là la constante du véritable harcèlement moral, c'est à dire la volonté d'humilier la victime..   

techniques patronales:

Un exemple de techniques de mobbing se voit dans le film "de gré ou de force" de F Cazeneuve. Un homme se fait embaucher par la Direction d'une entreprise pour liquider du personnel sans que celle-ci ait besoin de payer les indemnités de licenciement légales. Les employés en question sont casés à la cave en sachant qu'ils n'ont pas de perspectives d'avenir. Aux tracasseries quotidiennes s'ajoutent des attaques plus personnelles basées sur le dossier médical. Ce film est assez réaliste sauf sur un point, c'est le bourreau qui fait l'objet de maladies psychosomatiques alors qu'habituellement c'est plutôt le lot des victimes.